La cité morale des économistes
Essai sur la portée politique de la science économique

Mon e-livre par Antoine Fréjaville

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LA SCIENCE ECONOMIQUE COMME PROJET POLITIQUE

A propos d'un livre d'Antoine Fréjaville

Jean Cartelier, Université de ParisX-Nanterre, Economix

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Depuis plus de deux siècles et demi les économistes tentent de faire croire qu'ils sont vis-à-vis de la société, au moins pour ses aspects économiques, comme les physiciens vis-à-vis de la nature, qu'ils en connaissent les lois et qu'ils peuvent même indiquer les conséquences plus ou moins inévitables des politiques suivies par les diverses autorités. En bons scientifiques, ils reconnaissent qu'ils n'ont pas à se substituer à ces autorités mais seulement à les éclairer. Ce faisant, ils commettent probablement un double abus : une surestimation de la capacité de leur discipline à analyser, comprendre, prévoir et influencer la marche de nos sociétés d'une part, et une sous-estimation de leur engagement politique en tant qu'économistes et parce qu'économistes, d'autre part. Loin d'être une " physique sociale ", la science économique serait plutôt une philosophie politique rationnelle. Ce qui n'est nullement diminuer l'intérêt qu'il y a à l'étudier, bien au contraire, mais est une incitation à ne pas souscrire aveuglément aux enseignements qu'elle diffuse et à ne pas être dupe du mimétisme des économistes qui calquent leurs comportements et leurs pratiques académiques sur ceux des scientifiques.

L'ouvrage d'Antoine Fréjaville vient à point pour montrer non seulement que les économistes sont des citoyens comme les autres mais que l'économie politique elle-même, en tant que discipline autonome, constitue une prise de position politique fondamentale. Plus précisément, l'auteur entend montrer que la science économique est un projet politique particulier, " celui de faire réaliser le bien public par des individus qui ne s'en soucient pas ". Il s'agit ici moins d'une harmonie spontanée des intérêts individuels que de la possibilité d'instituer une société dans laquelle le bien public, déterminé par un théoricien-législateur bienveillant, transcende les individus auxquels il est demandé de ne s'intéresser qu'à leurs propres affaires. Ce faisant, ils parviendront ensemble mais sans le vouloir à ce bien public à la définition duquel ils n'ont pas pris part. Antoine Fréjaville oppose ce projet économiste à deux autres visions politiques fondamentales, le projet libéral, dans lequel on ne se soucie pas de donner un contenu précis au bien public (la liberté de l'individu de ne s'occuper que de soi suffit), et le projet socialiste, dans lequel les individus " doivent rechercher délibérément et consciemment le bien public ". Si peu de personnes aujourd'hui défendent ouvertement le projet socialiste, une grande confusion règne à propos de la doctrine libérale, trop souvent confondue avec l'orthodoxie économique. Un des mérites de ce livre est de rendre impossible une telle identification, dont l'inconvénient principal est de masquer la spécificité politique du discours économique qui est loin de se réduire à n'être que libéral.

La science économique à laquelle songe l'auteur n'est pas toute la pensée économique. L'économie classique ricardienne et post-ricardienne relève sans doute d'une autre ambition et il ne manque pas d'économistes directement préoccupés de donner un caractère plus objectif que normatif à leur discipline. Nombre d'auteurs, plus ou moins étiquetés mercantilistes, souvent des tenants de l'approche monétaire (au sens de Schumpeter), semblent même étrangers au projet décrit par Antoine Fréjaville. Les problématiques de la richesse de la nation et de la puissance du Prince, faisant une large place à l'emploi, à une balance extérieure positive et à une capacité d'entretenir une force armée importante, paraissent très différentes du projet économiste tel qu'il est entendu dans ce livre. La recherche de la puissance (richesse) nationale peut coïncider parfois avec celle du bien public économiste lorsqu'il s'agit du plein-emploi, mais l'idée n'est pas de faire atteindre l'objectif collectif à l'insu des individus mais bien au contraire de mettre en œuvre ouvertement tous les moyens pour empêcher les individus de s'y opposer ou les contraindre de s'y soumettre. De telles préoccupations sont loin d'avoir disparu aujourd'hui même si elles se mêlent parfois à celles inspirées par l'économie du bien-être. En somme, le projet économiste selon l'auteur n'est qu'une partie des idées que diffusent les économistes. Il faut garder à l'esprit cette limite, qui est moins celle de cet ouvrage que celle de l'usage qui peut en être fait pour décrypter les discours dominants.

La science économique que l'auteur considère est celle qui s'est développée depuis Walras. Nombre des analyses que l'auteur propose pourraient pourtant s'appliquer aux physiocrates et à Quesnay en particulier, c'est-à-dire à l'origine même de l'économie politique comme science. C'est dire que si l'économie analysée par l'auteur n'est pas toute la discipline elle est cependant l'essentiel de ce qui est reconnu aujourd'hui dans le monde universitaire et, par extension, de ce qui est diffusé et vulgarisé par les divers médias. Une caractéristique remarquable de la plupart des travaux académiques aujourd'hui, de théorie pure ou d'économie appliquée, est de rendre indissociables l'explication - le point de vue objectif - et la prescription - le point de vue normatif. Les divers équilibres (partiels ou généraux) mis en évidence par les différents modèles élaborés par les économistes sont le plus souvent caractérisés en termes de bien-être ou d'optimalité. L'oubli d'une telle référence au bien-être disqualifierait l'auteur d'une contribution qui se voudrait uniquement descriptive et explicative. Les conditions sous lesquelles les équilibres préférables seront effectivement préférés font partie des exercices imposés aujourd'hui (incitations, mechanism design, etc.).

L'approche adoptée par Antoine Fréjaville pour analyser le projet économiste est fort séduisante. L'auteur choisit en effet de le traiter comme un récit, obéissant comme tel à des règles et à une certaine logique. Il existerait une " contrainte d'écriture " consistant " à faire réaliser le bien public par ses personnages, sans que ceux-ci le recherchent ". Mais il s'agit d'histoires rigoureuses puisqu'il faut respecter la rationalité des agents et la logique hypothético-déductive. Mais cette rigueur ne fait pas obstacle à ce que les récits des économistes soient traités comme d'autres récits, plus littéraires. L'auteur s'inspire d'ailleurs de Wladimir Propp qui a étudié les récits merveilleux russes. Il dégage ainsi, à partir de La Fable des abeilles de Mandeville, cinq éléments canoniques du récit économique qui vont se retrouver dans tous les écrits ultérieurs des théoriciens. Ce sont : (i) l'attitude individuelle (pas de souci du bien public), (ii) le bien public (la définition de l'intérêt général donnée par l'auteur-théoricien), (iii) le mécanisme qui " part des actions pour arriver à leur résultat collectif (…) dont l'auteur-théoricien reconnaît le caractère heureux ", (iv), le comportement des individus et enfin (v) l'action consciente de l'Etat-législateur. Les quatre derniers éléments vont être le sujet des chapitres faisant suite à l'introduction générale. Mais, comme dans tout récit bien mené, une morale se dégage dont l'auteur va montrer dans un chapitre suivant qu'elle est fondamentalement puritaine. Ce qui l'amènera à s'interroger pour finir sur la cohérence d'ensemble du projet économiste lorsque les individus sont dotés de préférences sociales.

S'agissant du bien public des économistes, Antoine Fréjaville défend l'idée qu'au-delà de la diversité des points de vue (du surplus du consommateur de Marshall au contractualisme de Buchanan en passant par la fonction d'utilité collective), " ce sont [toujours] des agents, à la recherche de leur propre intérêt, qui vont - avec l'assistance bienveillante de l'économiste - déterminer le bien public ". Cette assistance bienveillante semble en effet nécessaire. Cela est l'évidence pour ce qui concerne l'observation des surplus ou le choix des coefficients de pondération des utilités individuelles, mais cela est également vrai pour les contrats portant sur les droits de propriété par exemple, puisque tout accord de type contractuel n'est possible que s'il est exécutable, ce qui implique une institution capable de faire respecter les droits établis par contrat. La généralisation du contractualisme à l'idée du contrat social se heurte cependant à l'idée que les individus d'aujourd'hui n'ont pas approuvé ou signé le " contrat originel " par lequel les droits de propriété originaux ont été institués. Ils sont liés cependant par cet accord, soutient Buchanan, et l'Etat le fait respecter. Un tel Etat n'a donc rien de démocratique puisqu'il n'est pas l'émanation des individus et n'est pas représentatif (issu d'un vote par exemple).

Pourquoi ne pas dire tout simplement qu'un Etat hobbesien est l'hypothèse incontournable fondant toute possibilité d'accord entre individus ? On pourrait résumer cet argument par l'idée du n + 1. Dans la théorie de l'équilibre général, il est clair que l'on ne peut commencer à décrire un individu qu'après avoir posé l'hypothèse de l'existence d'un espace commun de biens. En d'autres termes il y a n individus plus un élément donné a priori. De façon très générale, on ne peut parler des éléments d'un ensemble qu'en posant l'existence de cet ensemble. Un contrat (un échange ou un don) n'implique pas deux éléments (les deux individus) mais bien trois (les deux individus et la possibilité du contrat, de l'échange ou du don). L'idée même d'une construction de l'ensemble englobant (contrat, échange, don) à partir d'éléments non définis par rapport à cet ensemble, c'est-à-dire qui ne soient pas des contractants, des échangistes ou un donneur et un donataire, est difficilement concevable.

Par ailleurs, l'interprétation selon laquelle les individus sont muets dans l'évaluation du surplus, qu'ils parlent au théoricien dans le contrat et que le tâtonnement walrassien représente un cas intermédiaire ne semble pas conforme à la description (exacte) que l'auteur en donne. L'individu doit communiquer à Marshall la totalité de sa courbe de demande et pas seulement la quantité qu'il demande ou offre à un prix donné. Il lui parle donc et il lui parle tellement qu'il lui dit tout ce qu'il peut dire. Dans le contrat, les individus se parlent sans doute mais ne communiquent à Buchanan que le résultat auquel ils sont parvenus, la façon dont ils l'ont fait n'intéressant en rien l'autorité chargée de faire respecter les termes du contrat.

L'opposition du troc gossenien et du troc jevonien est éclairante mais est présentée de façon trop concise pour être pleinement entendue. L'idée du troc jevonien comme " image virtuelle que le bon gouvernement idéalement savant et bienveillant " projette dans la tête des individus fait penser à la " volonté générale " selon Rousseau ou au " spectateur impartial " selon Smith. Toutes sont des représentations de la société intériorisées par les individus, revenant à les définir en référence à un ensemble social déjà constitué (l'échange comme triade et non comme dyade).

Selon l'auteur, " les économistes utilisent donc des méthodes variées pour déterminer le bien public, et cependant, ces méthodes présentent quelques constantes ". Notamment le bien public a un contenu (à la différence, nous dit Antoine Fréjaville, de la philosophie politique libérale), y compris l'optimum parétien. Dans ce dernier cas, le principe de non-comparaison entre utilités individuelles est sauvegardé, à la différence des fonctions d'utilité collective faisant intervenir une instance supra-individuelle. Ici, l'intervention d'un législateur bienveillant pour définir l'optimum paraît assez différente de ce qu'elle est dans les autres cas examinés par l'auteur : pas de pondération des individus, pas d'interrogations sur leurs intentions, etc. Certes, il faut qu'existe un regard extérieur sur la société pour produire une telle référence, celui de l'auteur-théoricien ; mais, à ce stade, il n'est pas nécessaire que l'économiste entame un dialogue avec les individus ni qu'il intervienne de quelque manière que ce soit. L'existence de l'optimum est un résultat de principe : il n'est nullement nécessaire de le calculer et de le déterminer avec précision.
Que les allocations de marché de l'équilibre général concurrentiel soient exactement celles de l'optimum parétien est une " divine surprise ". Mais là encore, un résultat de principe. Il faut cependant s'assurer ici que (i) les conditions de validité de principe du résultat (premier théorème de bien-être) sont réunies ; si elles ne le sont pas, alors il y a une place pour l'Etat (voir plus loin) (ii) que les conditions de fonctionnement d'une économie de marché concurrentielle sont bien établies. Et, sans doute, il faut bien admettre quelque instance supra-individuelle faisant respecter les conditions de l'échange volontaire. Mais une telle instance n'a pas besoin de déterminer précisément le contenu exact de l'optimum mais doit seulement assurer son atteinte, en permettant au marché concurrentiel d'être opératoire. La position de l'auteur-théoricien est donc très particulière dans ce cas limite de la concurrence parfaite.

Il demeure que, dans le cas général, la proposition de l'auteur selon laquelle " ce qui nous semble en fait le plus original, c'est (…) cette réunion entre la référence aux individus et un objectif social déterminé " reste vraie et caractérise bien la science économique comme philosophie politique rationnelle, ce qu'elle est depuis Quesnay au moins. Il ne suffit donc pas d'être " libéral " (laisser faire, laisser passer) pour être économiste. Il faut en outre définir un bien public " en surplomb " des individus et ne pas les importuner avec un quelconque souci de l'atteindre. Ceci pourrait paraître un peu contradictoire. Les économistes doivent en effet convaincre les individus du bien-fondé du bien commun qu'ils ont défini mais aussi les convaincre de ne pas s'en soucier. Il ne s'agit pas là à proprement parler d'une contradiction. Dans le cas général de comportements stratégiques, l'issue en est toute naturelle : l'opportunisme et la recherche de l'intérêt personnel, attitude individuelle légitimée par l'économiste, est mise au service de l'atteinte du bien commun au travers d'institutions ou de règles (incitations) proposées par l'économiste-législateur, autre visage de l'auteur-théoricien. La figure du despote éclairé hante la science économique depuis le milieu du 18ème siècle au moins.

Antoine Fréjaville discute également la question de la compatibilité entre responsabilité individuelle, qui se traduit par : " personne n'est plus malheureux que par la faute de la nature ou de sa propre faute " (Walras, cité par l'auteur), et bien public dans la théorie de l'équilibre général qui implique que les actions d'autrui ont un effet sur l'individu. A cette occasion, il propose une intéressante analyse de la capitalisation de Walras. La marchandise " revenu net perpétuel " permettrait de rendre compatible le principe de responsabilité individuelle et l'équilibre, ce que ne ferait pas un traitement du capital à la Böhm-Bawerk. Pour autant, est-ce bien le motif qui a guidé Walras dans cette voie ? Ne nous dit-il pas lui-même, contre Böhm-Bawerk, qu'il ne voit pas les marchés sur lesquels sont négociés les biens futurs, etc. ?

Le but du chapitre 3 consacré aux mécanismes est, selon l'auteur, " d'exposer l'indépendance logique des mécanismes économiques et des comportements économiques, afin de montrer ensuite que l'habitude des économistes de faire actionner ces mécanismes par des agents " inconscients " de leurs conséquences sur le bien public, résulte d'une volonté politique et non d'une nécessité logique ".

L'indépendance des comportements vis-à-vis des mécanismes semble effectivement un point central. Pour s'en tenir au mécanisme économique par excellence, la loi dite " de l'offre et de la demande ", il est bien clair que la variation du prix d'un bien selon le signe de la demande excédentaire existant sur le marché dudit bien est une règle qui ne dépend pas du point de savoir comment chaque individu détermine sa demande excédentaire. Mais l'indépendance en question doit être bien comprise. Elle ne doit pas être confondue avec l'ignorance dans laquelle se trouve un agent concurrentiel du résultat final auquel concourt l'action qu'il va entreprendre. Le cas général est celui des comportements stratégiques dans lesquels chacun connaît la totalité de la matrice des gains de telle sorte que les résultats que donne le mécanisme sont connus et interviennent dans les décisions et les comportements des individus (type meilleure réponse). En ce sens, les agents ne sont pas " inconscients " du bien public. Les agents pris dans le dilemme du prisonnier savent bien quelle combinaison d'actions serait optimale. Mais, en toute connaissance de cause, ils ne recherchent que leur position préférée, compte tenu des actions d'autrui ce qui éloigne la société de la meilleure situation possible.

Il demeure troublant que l'on puisse prêter aux individus une connaissance complète des conséquences de leurs actions. Non que ce soit contraire au projet économiste de l'atteinte du bien commun par des individus qui ne s'en soucient pas. L'expérience banale d'un carrefour bloqué par des automobilistes tentant de s'y engager simultanément bien que chacun comprenne que c'est là la source du blocage montre que la transparence du collectif à l'individuel ne suffit pas nécessairement à trouver une solution commune satisfaisante. L'économiste-législateur résout le problème en instituant un mécanisme adéquat, des feux de circulation assortis d'une forte amende en cas d'infraction. Ce qui est troublant dans l'idée de la transparence est plutôt qu'elle est contraire à l'idée " des forces anonymes du marché ", ces forces anonymes étant opaques par définition. La pertinence et la séduction de l'idée de la " main invisible " viennent moins de ce qu'il soit possible que des intérêts individuels soient harmonisés - les feux de circulation sont bien visibles - que de l'idée que cette harmonie existe à l'insu des individus. L'émerveillement des économistes, de Mandeville à Hayek, devant la capacité de l'économie de marché à fonder une société vient de ce que le marché fonctionne grâce à (ou en dépit de) l'information incomplète qui le caractérise. En d'autres termes, deux types différents de problèmes se présentent aux économistes :
(i) faire que des individus uniquement préoccupés de leur intérêt personnel mais connaissant toutes les conséquences de leurs actes (information complète ), agissent de sorte que l'intérêt général soit atteint; il s'agit d'instituer des règles ou des mécanismes incitatifs adéquats ; telle semble être la préoccupation dominante aujourd'hui
(ii) comprendre comment des individus intéressés voire cupides, ignorant les conséquences de leurs actions, puissent former une société dans laquelle, chacun, compte tenu de l'action des autres, se trouve dans la situation la meilleure à laquelle il puisse prétendre ; il s'agit de comprendre quels sont les mécanismes qui rendent possible un tel résultat (action délibérée du Prince ou " main invisible " ; telle semble être la préoccupation traditionnelle de l'économie politique depuis Steuart et Smith et le terrain sur lequel partisans et adversaires d'une action délibérée de l'Etat s'affrontent..

Aujourd'hui, le projet économiste concerne davantage les problèmes du premier type que ceux du second. C'est sans doute ce que veut dire l'auteur quand il dit que la profession ne s'intéresse plus aux mécanismes.

L'interprétation de l'hypothèse d'anticipations rationnelles comme signifiant que les agents " connaissent le modèle " et qu'ils " sautent directement à l'équilibre " est, de ce point de vue, contraire à tout ce qu'enseigne la tradition de l'économie politique. Antoine Fréjaville, citant Lucas, en conclut à l'abandon de l'étude des mécanismes. Cela est en effet préoccupant. Semblent faire partie des mécanismes le cheminement vers l'équilibre. Le tâtonnement walrassien est explicitement cité, ainsi que le cobweb et le multiplicateur keynésien. Manquent à la liste les modèles de non-tâtonnement et le mécanisme de Cantillon-Smith qui ont la particularité, par rapport au tâtonnement de décrire la dynamique effective (et non pas seulement virtuelle) du déséquilibre. Cela est dommage car cela pourrait faire pièce aux récits de type évolutionniste évoqués à propos de Hayek et de la concurrence des monnaies (Menger et l'origine de la monnaie auraient pu être cités également) et à toutes les fables racontant comment les hommes ont décidé de vivre en société, d'inventer la monnaie, etc.

Antoine Fréjaville voit dans les mécanismes une tentation constructiviste et s'il y a quelque exagération dans l'affirmation selon laquelle " le tâtonnement a donné naissance au socialisme de marché, l'entrée dans la branche au monopole public, et le multiplicateur a donné naissance à la " politique budgétaire " keynésienne ", il n'est pas douteux qu'une compréhension des conditions de stabilité globale (cruellement manquante !) pourrait conduire à la mise en place d'institutions ou de règles ad hoc (une idée de la chose est donnée aujourd'hui par la prétention d'assujettir les banques centrales à la règle de type Taylor).

A propos des comportements, objet du chapitre 4, l'auteur évoque les deux façons de les considérer : soit montrer comment les motivations expliquent les actions, soit examiner si les actions adoptées sont le fait d'individus " autocentrés " ou non. Ce chapitre contient des analyses intéressantes du tâtonnement walrassien. On notera en particulier la position qu'adopte Walras sur la spéculation, qui paraît dépendre essentiellement d'un désir de sauvegarder la morale.

Toutefois, ce qui retient le plus l'attention est la section consacrée à la théorie des jeux non coopératifs qu'il intitule : " des comportements économiques sans mécanisme ". Il y a là un véritable problème d'interprétation. Si l'on admet, ce que fait l'auteur, qu'un mécanisme est ce qui permet de passer des actions au résultat social, alors on a envie d'affirmer exactement le contraire, à savoir qu'un jeu est fondamentalement un mécanisme - la matrice des paiements donne tous les résultats sociaux correspondant à toutes les actions concevables - et que la question des comportements est liée simplement à la question du choix parmi tous les résultats possibles de celui ou de ceux que le théoricien a décidé de privilégier. On retrouve ici le point discuté plus haut à propos de l'information complète. Parmi tous les résultats a priori possibles, les éléments de la matrice des paiements, lesquels sont pertinents au sens d'être atteignables à partir de comportements individuels acceptables ?

Les économistes soutiennent que les agents " jouent Nash ", c'est-à-dire leur meilleure réponse, alors même que les nombreuses expériences effectuées montrent qu'il n'en est rien. Le " jeu du mille-pattes ", qui a pour unique équilibre de Nash l'arrêt du jeu par le premier joueur, est joué différemment, y compris par les personnes familières de la théorie des jeux. Que signifie cela ? La lecture de cet ouvrage suggérerait que l'interprétation de ces résultats est moins que les individus ne sont pas rationnels mais plutôt qu'ils ne sont pas autocentrés. Les individus prennent en considération les différents résultats possibles (ils sont connaissance commune) contrairement à ce que suppose le projet économiste. Naturellement, ceci est la source d'un grand trouble. Chacun pense sans doute qu'autrui a le souci d'aboutir à une situation meilleure pour tout le monde, même s'il n'est pas possible de déterminer avec exactitude laquelle prévaudra. Préserver le projet économiste conduit-il à s'interdire d'examiner des individus parétiens (voir plus loin) ?

En fait, le souci de la rationalité des agents que les économistes ont toujours eu ne se justifie véritablement (en dehors des propriétés formelles agréables dues à cette hypothèse) que par la possibilité qu'elle leur donne de former des propositions sur le bien public. Antoine Fréjaville le montre, en ce qui concerne Walras, dès la leçon sur l'échange de deux marchandises entre elles. Il est clair que, de façon générale, une telle hypothèse est la condition de possibilité de l'économie du bien-être, quelle qu'elle soit, alors même qu'elle n'est nullement indispensable à la démonstration de l'existence de l'équilibre général..

La critique de l'interprétation du jeu du solitaire de Schelling est ingénieuse mais assez peu utile finalement puisque elle consiste à montrer que tout dépend des préférences des individus, ce dont on pouvait se douter. Elle le conduit à affirmer : " un mécanisme dont le résultat est connu au départ n'est plus un mécanisme : c'est un effet externe au sens large " (p. 29). Dans une société transparente avec comportements stratégiques tout est effet externe au sens large. Affirmer qu'il n'y a pas de mécanisme conscient c'est se ranger dans la tradition de l'économie politique et refuser la problématique des incitations, si l'on se réfère à la distinction schématique évoquée plus haut.

Au total, l'auteur convainc bien le lecteur dans ce chapitre que " l'idée de faire réaliser le bien public par des individus qui s'en désintéressent (…) semble donc un programme politique menant à des choix politiques " (p. 31). Ceci conduit tout naturellement au chapitre suivant, consacré à l'Etat économiste.

Le point central ici est de noter que la présence de l'Etat dans le récit économiste ne tient nullement ni à des considérations de type réaliste ni même à la question de savoir si l'atteinte de l'équilibre est favorisée ou entravée par une action politique. L'Etat figure dans le discours économique pour définir le bien public et le faire atteindre par des individus qui ne s'en soucient pas. A l'instar des contes populaires merveilleux, l'Etat est à la fois celui qui oriente l'histoire vers une issue favorable en éclairant les personnages sur ce qui se passe mais aussi celui qui intervient directement pour aider les protagonistes dans leurs actions.

Antoine Fréjaville dresse la liste des problèmes qui, aux yeux des économistes, justifie l'existence de l'Etat. Cette liste semble un peu trompeuse en ce qu'elle mêle deux sortes (au moins) de considérations : les unes, classiques et systématiquement soulignées par les auteurs de manuels, comprennent les biens collectifs, les monopoles naturels, etc., et concernent le fonctionnement d'une économie de marché concurrentielle déjà établie (en fait, il s'agit de tous les cas de figure dans lesquels le marché n'est pas efficient), les autres, moins souvent soulignées, sont la condition même de l'existence d'une économie de marché et sont : l'établissement des droits de propriété, la garantie du respect des contrats passés entre les individus, etc.. L'expérience récente des économies dites " en transition " enseigne bien que l'existence d'une législation claire sur les faillites et le respect des contraintes budgétaires ne vont pas de soi.
Mêler ces ordres de considération si différents n'est probablement pas heureux. Dans le premier cas, on pourrait admettre à la rigueur la fable d'individus échangistes se donnant par un vote unanime un Etat pour régler les difficultés liées aux monopoles naturels et biens collectifs (équilibre de Lindahl, tâtonnement à la Drèze- de la Vallée Poussin, etc.) car il s'agit de sauver l'optimum dont l'existence a été révélée par la science et dont l'atteinte est rendue difficile par des circonstances contingentes. Dans le second cas, une telle fable est irrecevable car elle conduit à l'idée que les individus (non définis) seraient à même de déterminer le cadre institutionnel (lois, règles, institutions, incitations, etc.) qui en feraient des individus définis, ceux d'une économie de marché par exemple, nouant et respectant des contrats, ne violant pas les droits de propriété, soumis à la contrainte budgétaire, etc.. Quel serait le méta-mécanisme qui engendrerait, à partir d'individus sans détermination, des individus socialement constitués comme agents d'une économie de marché? Sûrement pas le mécanisme de marché lui-même !

L'auteur distingue classiquement une économie publique normative (le responsable du monopole naturel tarifie au coût marginal) et une économie publique positive qui entreprend l'analyse économique du politique. Notons en passant que ce dernier trait parachève bien la démarche économiste : est établie dans un premier temps une approche autonome de la société, apparemment indemne de la politique (c'est le sens de la rupture historique de la théorie économique avec l'approche mercantiliste), et on l'applique, en un second temps, à la politique comme si cette approche était en surplomb par rapport à elle, alors qu'elle n'est qu'une autre façon d'en faire, plus ou moins déguisée.

Il ne faut pas s'étonner que l'Etat économiste ne soit pas démocratique. La définition du bien public ne doit pas être soumise aux aléas ou (pire !) aux mécanismes de la démocratie représentative. La détermination du bien public, qu'elle se fasse avec la coopération des individus ou non, leur échappe et doit leur échapper. Cela est clair avec l'optimum parétien qui ne dépend en aucune façon d'une comparaison entre individus ou de leur poids relatif. Mais cela est encore plus évident dans les autres cas. Une fonction d'utilité collective à maximiser, par exemple, ne saurait être l'enjeu d'une lutte quelconque entre les individus sans perdre immédiatement son sens de référence de bien public (opposable à tous ?).
Mais ce n'est pas seulement la définition du bien public qui doit être soustraite à l'affrontement (même démocratique) entre individus. Il faut également que l'instance chargée de guider les individus à leur insu ne soit pas captive des luttes d'intérêt. Problème insoluble car sans cesse reporté d'un niveau à l'autre " qui contrôle les contrôleurs ? ".

L'auteur montre comment Walras résout ce problème en rendant l'Etat économiquement indépendant des individus et notamment de l'impôt (Etat propriétaire foncier). C'est que l'Etat n'est ni le " fondé de pouvoir " des individus pourrait-on dire, parodiant l'adage marxiste de l'Etat fondé de pouvoir de la bourgeoisie, ni le welfare state, contraire à l'idéal de responsabilité individuelle. Si la démocratie moderne naît avec l'affirmation de la nécessité de consentir à l'impôt, on peut dire que Walras est profondément anti-démocratique. Selon Antoine Fréjaville, l'Etat est l'incarnation de l'humanité, il doit protéger les générations futures des appétits de la génération actuelle. En résumé les deux échangistes du " troc jevonien " qui ont permis de définir " l'idéal " représentent donc l'ensemble de l'humanité ".

C'est bien dans cette ligne de l'indépendance de l'Etat par rapport aux individus que se situe également l'impôt optimal de Mirlees. Au-delà de ses particularités, l'auteur voit dans le raisonnement de Mirlees, que l'objectif " n'est pas de donner le pouvoir aux électeurs mais de le retirer aux politiciens ", ce qui est sans doute le but poursuivi par la science économique depuis Quesnay au moins.

Antoine Fréjaville examine les problèmes du constitutionnalisme économique en s'appuyant sur Walras, Hayek et J. J. Laffont. La difficulté est finalement toujours la même : ou bien l'instance considérée est supposée " bienveillante ", c'est-à-dire recherchant le bien public, et alors la question de l'atteinte du bien public est résolue en son principe, ou bien cette instance est soumise, comme les autres, à l'intérêt personnel (des politiciens, des contrôleurs, des superviseurs, etc.) et il faut trouver une autre instance, extérieure, chargée de mettre en oeuvre les incitations appropriées pour faire en sorte que les politiciens, les contrôleurs, les superviseurs, etc. trouvent sans le vouloir le chemin du bien public. En tout état de cause, la rédaction de la " constitution économique " qui est l'expression de l'intérêt général ne peut incomber qu'aux économistes. L'auteur conclut sur ce point que " les économistes entendent réserver à un nombre aussi réduit que possible, en fait réduit à eux-mêmes, la recherche consciente du bien public " . La raison de cela serait que " la volonté de réaliser le bien public est une passion perverse que seuls les théoriciens savent maîtriser en leurs cœurs ".

Il est couramment enseigné que l'émergence de l'économie politique comme discipline autonome s'est faite au prix d'une double rupture, d'une part avec la politique, d'autre part avec la morale. Ce qui précède montre que la rupture avec la politique est un faux semblant car la science économique est avant tout un projet politique, formulé d'une façon rationnelle et présenté comme scientifique. Le chapitre 6, " La morale prêchée par les économistes ", montre que la rupture avec la morale est elle aussi une illusion.

L'auteur affirme d'emblée que la morale prêchée par les économistes aux individus a un double contenu, (i) ne pas être opportuniste (ii) ne pas s'ingérer dans les affaires collectives " et un double but, (i) promouvoir les vertus utiles pour l'atteinte du bien public, (ii) respect de la parole donnée et de la singularité de chaque individu. Pour lui, l'opportunisme est combattu sur le plan, moral, alors qu'il peut être instrumentalisé par des incitations appropriées, car c'est ainsi que l'on pourrait se passer d'un Etat " dont les représentants chercheraient consciemment le bien public ". Par ailleurs, la morale de non-ingérence a une valeur fondamentale (aux yeux de Schumpeter comme de Hayek) car elle serait nécessaire " pour éviter le retour à la barbarie " ; " la cité doit être construite autour d'elle ".

On trouve avec les prêcheurs de Buchanan et les " punisseurs altruistes " de Fehr et Gätcher une médiation analogue à celle exposée à propos du constitutionnalisme, c'est-à-dire des individus imaginés par les économistes dont le rôle va être d'amener les individus à suivre certaines règles de conduite. Ce qui est intéressant ici est moins le fait de rencontrer une figure logique familière que de voir la morale asservie à un objectif en fait entièrement construit par l'économiste. Il ne s'agit plus de sauver son âme et d'assurer soin salut éternel car l'économiste ne soucie de bien autre chose mais simplement de rendre effectif un état souhaitable de la société, état qui échappe aux individus. La prescription morale demeure soumise à un idéal extérieur à l'individu. Ceci semble en contradiction avec la " liberté moderne " et un libéralisme politique qui ne semble rien admettre en dehors de l'individu.

Antoine Fréjaville remarque, à propos des prêcheurs, que le raisonnement défendu par Buchanan pêche par le fait qu'il n'est pas correct de comparer des situations dans lesquelles les préférences des individus ont changé (à cause des prêcheurs) car le fait d'accepter un changement de ses préférences pour aboutir à une consommation supérieure n'est nullement évident. Il en conclut qu'en fait la morale de Buchanan est plus fondamentale qu'instrumentale. Cette remarque est sûrement intéressante pour la compréhension des propos de Buchanan mais on peut se demander si elle n'affaiblit pas la thèse du lien nécessaire lien censé exister entre le projet économiste et la morale. Ce lien deviendrait purement circonstanciel au lieu d'être indispensable, tenant, par exemple, aux préférences morales personnelles de Buchanan, plutôt qu'à la nécessité d'inventer un instrument adéquat à l'atteinte inconsciente du bien public.

Dans l'exemple des " punisseurs altruistes " de Fehr et Gätcher, une difficulté logique se présente, du même ordre que pour les prêcheurs de Buchanan, car il n'est pas possible de comparer selon un critère parétien, les situations sans punitions et avec. En outre, le résultat de Fehr et Gätcher fait abstraction des préférences sociales des individus (est-il préférable de vivre dans une société avec punition ou dans une société sans punition ?) pour ne reposer que sur un critère purement utilitariste de la quantité de bien social consommé au total.

Au-delà des problèmes de cohérence que peuvent rencontrer ce type de travaux, ils révèlent la tendance normative des économistes à imaginer que pourraient exister spontanément les institutions diverses (des prêcheurs à l'Etat en passant par la monnaie et les punisseurs altruistes) permettant aux individus d'atteindre à leur insu un bien public défini a priori par l'économiste-législateur.

Dans l'évocation du récit qui retrace comment on est passé de la barbarie (tribale) à la société moderne (capitalisme), Schumpeter, comme Hayek, souligne le rôle du développement progressif d'une sphère privée mettant l'individu à l'abri de la pression directe de la société. Cette histoire est aussi celle du triomphe progressif de la raison sur les passions. La démocratie comme le socialisme illustreraient la " résurgence des instincts primordiaux refoulés ". La morale économique s'exprime dans la supériorité d'une société fondée sur une constitution économique avec concurrence sur une société démocratique fondée sur le pouvoir de la majorité.

La question de la rationalité supposée des agents dans la théorie économique, qui est l'objet de tant de discussions stériles, apparaît ici sous un jour plus intéressant. Si l'on suit Hayek, le comportement rationnel n'est pas la prémisse de la théorie économique. L'idée est plutôt que la concurrence oblige les agents à être rationnels et le comportement rationnel, qui a pour but de " prévaloir sur ses concurrents " s'oppose à une autre attitude qui vise à " réaliser un but commun avec nos proches " (p. 30). L'auteur, à partir d'un exemple simple opposant une tribu primitive et une société avec entrepreneurs montre que Hayek, en fait, donne la priorité à la morale (le comportement " rationnel " ") sur le bien-être.

Le dernier chapitre de l'ouvrage se demande si " les institutions économiques sont vraiment utiles ".
La question posée est en fait : que reste-t-il des enseignements de la théorie économique sur le rôle du marché, des entrepreneurs et des biens collectifs lorsque l'on suppose que les individus ont des préférences sociales ? Avoir des préférences sociales signifie ici être capable de classer non seulement des allocations mais aussi les procédures qui permettent de les atteindre.
Antoine Fréjaville va montrer que dans ce cas peuvent tomber des résultats fondamentaux. C'est le cas, par exemple, de la préférence du troc jevonien sur le troc gossenien. Après avoir esquissé une critique libérale du second théorème du bien-être, il montre que les individus peuvent produire consciemment une allocation contenue dans le noyau et que cette allocation peut être unanimement préférée à l'allocation de l'équilibre concurrentiel. La préférence accordée par les économistes à ce dernier est de type moral car " les agents y parviennent spontanément dans l'ignorance vertueuse de l'existence d'autrui ". Le rejet des modèles de non-tâtonnement viendrait qu'ils exigent que les individus se mettent d'accord sur des règles de transactions (sous le voile d'ignorance) et qu'un " tel accord serait proche d'un accord politique conscient ".

Pour finir, dans une conclusion, l'auteur se demande " qu'est-ce qui ne tourne pas rond avec le projet des économistes ? ".
En bref, la société a une face positive - la spécialisation, les externalités - elle permet la prospérité ; mais elle a une face négative car elle porte atteinte à la " liberté moderne " (selon Constant) à cause des empiètements volontaires des individus sur le domaine privé d'autrui quand ils s'ingèrent dans les affaires collectives. Les économistes, nous dit l'auteur, bâtissent une cité idéale dans laquelle la prospérité sera atteinte dans la liberté négative. Les mécanismes économiques montreraient " les avantages non sociaux de la vie sociale ".
Ce qui ne tourne pas rond, nous dit l'auteur, est que " pour faire fonctionner la cité, ses dirigeants sont amenés à exercer sur les individus une oppression à la fois opposée et similaire à celle qu'un Etat socialiste autoritaire exerce sur ses sujets ". Ces pressions se résument en un Etat incitateur et l'individu manipulé, d'une part, et un unanimisme moral, d'autre part.

 
 
     
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